Les fiches techniques juridiques


FICHE J 3.2

avril 2024

J. Structures et institutions

 

Entreprises Adaptées (EA et EATT)

Présentation

Les entreprises adaptées (EA) sont des entreprises du milieu ordinaire qui permettent aux personnes handicapées d’exercer une activité professionnelle dans un environnement adapté à leurs possibilités afin qu’elles obtiennent ou conservent un emploi.

Elles doivent être agréées par l’Etat et peuvent bénéficier sous conditions d’aides de l’Etat.

Bénéficiaires

Les travailleurs handicapés doivent être orientés vers le marché du travail par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH). Ils peuvent être recrutés sur proposition du SPE (France Travail, Cap emploi et missions locales) ou directement par l’EA.

Pour que l’EA soit éligible aux aides financières, les personnes handicapés recrutées doivent, selon les cas, répondre aux critères suivants :

Recrutement sur proposition du SPE (tout contrat sauf CDD Tremplin) :

  • Être sans emploi depuis 24 mois en continu ou discontinu depuis les 24 derniers mois ;
  • Bénéficier de minima sociaux (AAH, ASI, ASS, ADA, AV, RSA) ;
  • Avoir un niveau 3 ou infra ;
  • Sortir d’un ESAT, ULIS ou EREA depuis moins de 12 mois ;
  • Ou sortir d’un CFA depuis moins de 12 mois avec un projet professionnel à consolider ;
  • Être dans une autre situation relevant de l’expertise technique du SPE.

Recrutement direct :

  • Être sans emploi depuis 24 mois en continu ou discontinu depuis les 24 derniers mois ;
  • Bénéficier de l’AAH ;
  • Sortir d’un ESAT, ULIS, EREA ou CRP depuis moins de 12 mois ;
  • Sortir de CFA ou d’une institution spécialisée (IME, IMPro, IEM) depuis moins de 12 mois avec un projet professionnel à consolider ;
  • Être suivi ou sortir d’un service spécialisé (SAMSAH, SAVS, UEROS) avec un projet professionnel à consolider ;
  • Bénéficier d’un contrat d’apprentissage réalisé en EA depuis moins de 12 mois ;
  • Être âgé de plus de 55 ans ;
  • Bénéficier d’une pension d’invalidité de catégorie 1 ou 2.

CDD Tremplin et EATT : quel que soit le mode de recrutement, la personne doit être sans emploi.

Les modalités de recrutement doivent respecter les critères prévus par arrêté ou dans les cahiers des charges des expérimentations (voir fiche technique sur les CDD Tremplin).

A noter que les personnes accueillies dans des ESAT (voir notre fiche technique) peuvent travailler, simultanément et à temps partiel, dans une entreprise ordinaire ou dans une EA ou exercer, dans les mêmes conditions, une activité professionnelle indépendante, sans toutefois pouvoir accomplir de travaux rémunérés au-delà de 35 heures (décret à paraitre).

Statut, mise à disposition et sortie du dispositif

Les travailleurs handicapés sont recrutés par l’EA sous contrat de travail ordinaire, CDI ou CDD (sauf CDD Tremplin ou intérim).

A ce titre ils sont salariés de l’entreprise et bénéficient des droits de tout autre salarié : leur salaire horaire qui ne peut pas être inférieur au Smic est fixé en fonction de l’emploi occupé et de la qualification par référence aux dispositions réglementaires ou conventionnelles applicables dans la branche d’activité.

Le salarié bénéficie de tous les droits des salariés et d’une protection sociale complète (maladie, maternité, vieillesse, chômage, etc.).

Ils peuvent être mis à disposition par l’EA auprès d’un autre employeur si :

  • des contrats écrits sont conclus d’une part, entre l’entreprise adaptée avec l’employeur utilisateur et, d’autre part le travailleur handicapé ;
  • ces contrats fixent les conditions de la mise à disposition ; ils doivent être passés pour une durée maximale d’un an renouvelable une fois. Ils sont transmis pour information de l’inspecteur du travail et consultation du CSE, de l’entreprise utilisatrice ;
  • le contrat liant l’EA avec le travailleur handicapé fait l’objet d’un avenant qui précise notamment le travail confié au sein de l’entreprise utilisatrice/les horaires et le lieu d’exécution du travail, ainsi que les caractéristiques particulières du poste de travail/les éléments et les modalités de paiement de la rémunération due/les conditions d’une offre d’embauche au sein de l’entreprise utilisatrice.

L'employeur qui accueil une personne handicapée mise à disposition bénéficie à ce titre d'une aide soutenues à hauteur de 4 149 € par an et par ETP en 2020.

Un salarié handicapé qui a démissionné d’une EA pour travailler dans une autre structure du milieu ordinaire bénéficie, dans le délai d’un an à compter de la rupture de son contrat d’une priorité d’embauche s’il manifeste le souhait de réintégrer son EA d’origine. Celle-ci doit l’informer de tout emploi disponible compatible avec sa qualification.

 

Création et agrément des EA

Les EA peuvent être créées par des collectivités territoriales ou des organismes publics ou privés. Les sociétés commerciales doivent prendre la forme de personnes morales distincte de celle qui a présidé à la création.

Elles doivent passer un contrat d’objectifs triennal (COT) avec les services de l’Etat pour être agréées et employer au moins 55 % de travailleurs handicapés parmi ses effectifs de production.

Si une EA est implantée dans plusieurs régions la demande d’agrément doit être adressée au préfet de la région dans laquelle elle a son siège social.

L’EA est soumise aux dispositions du code du travail et bénéficie de l’ensemble des dispositifs destinés aux entreprises et à leurs salariés. Les EA doivent se soumettre au contrôle des agents des services du travail et de l’emploi qui peuvent se faire présenter tous les documents relatifs à la gestion.

Les EA doivent :

  • être placée sous l’autorité d’un responsable, sans préjudice des responsabilités incombant à l’organisme gestionnaire. Quand une section d’entreprise adaptée est annexée à un établissement ou service d’aide par le travail, elle peut être placée sous l’autorité du même responsable ;
  • faire l’objet d’une comptabilité distincte, qui est tenue conformément aux prescriptions du plan comptable général ;
  • constituer une unité autonome et viable économiquement sur la base d’une production commercialisée différenciée, de lieux de production clairement identifiés, de moyens en matériels et personnel distincts et d’une comptabilité distincte et complète.

Un contrat d’objectifs et de moyens (CPOM) doit être signé lors de l’agrément, il précise les conditions financières de l’aide accordée par l’Etat. Celle-ci qui est revue annuellement par voie d’avenant. L’enveloppe financière peut aussi être révisée en cours d’année à la hausse ou à la baisse pour tenir compte d’un changement de situation de l’EA.

Le CPOM a une durée maximum de 5 ans. Il est signé par le préfet de région qui prend en compte les besoins économiques et sociaux et de l’offre existante sur son territoire.

 

Les aides financières

Les EA bénéficient de différents types d’aides financières de l’État pour compenser les conséquences du handicap et soutenir les actions engagées liées à l’emploi des travailleurs handicapés dans les conditions du CPOM.

L’enveloppe financière est déterminée dans le cadre des négociations qui ont lieu chaque année entre la DREETS et l’EA lors du dialogue de gestion en fonction :

  • de son projet ;
  • de l’analyse des engagements négociés et des résultats obtenus et présenté dans le bilan annuel d’activité ;
  • de ses perspectives économiques.

Les aides de l’Etat ne peuvent pas se cumuler pour un même poste, avec une autre aide de même nature et ayant le même objet.

L’aide au poste pour les entreprises hors expérimentation, également attribuée aux entreprises adaptées implantées en milieu pénitentiaire :
En fonction du CPOM les EA perçoivent pour les travailleurs handicapés éligibles une subvention modulée par tranche d’âge et réévalués annuellement au regard de l’évolution du SMIC. Depuis mai 2023 :

  • 17 677 € par an et par ETP, pour les moins de 50 ans ;
  • 17 906 € par an et par ETP, pour les 50/55 ans ;
  • 18 366 € par an et par ETP, pour les 56 ans et plus.

Elle est versée mensuellement au prorata du temps réellement effectué. Une aide au poste minorée (30 % du Smic horaire) peut être versée en cas d’arrêt de travail du travailleur handicapé pour maladie ou accident. Lorsque l’absence ne recouvre pas un mois civil entier, l’aide est réduite au prorata du nombre d’IJ versées.

L'aide à l'accompagnement :
Elle peut être versée au titre de l'accompagnement professionnel individualisé, réalisé par l’EA au bénéfice des salariés mis à disposition auprès d'un autre employeur. A compter de mai 2023, son montant annuel pour un temps plein (au prorata pour un temps partiel) est de 4 707 €.

 Le fonds d’accompagnement à la transformation des EA :
Mis en place à titre transitoire sur la période 2019-2022, il vise à accroître l’optique inclusive des EA et à les accompagner dans les mutations profondes induites par la modernisation de leur cadre d’intervention.

Il permet d’allouer différents types d’aides :

  • Des aides en faveur de l’investissement dans des actifs corporels et/ou incorporels, se rapportant à la création ou à l’extension d’un établissement ou à la diversification de la production ou le changement fondamental de l’ensemble du processus de production.
  • Des aides aux services de conseil qui sont attribuées par le préfet de région dans le cadre d’une convention conclue avec l’EA.
Travail temporaire et CDD « tremplin »

La loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 avait instauré deux expérimentations visant à renforcer l’optique inclusive, qui ont depuis été perennisées par la loi n° 2023-1196 du 18 décembre 2023 pour le plein emploi et précisées par décret.

Le CDD « Tremplin » permet de favoriser la mobilité professionnelle des travailleurs handicapés vers les autres employeurs privés ou publics et l'accompagnement des transitions professionnelles en recourant à un contrat à durée déterminée (CDD) spécifique (voir la fiche technique dédiée).

L’entreprise adaptée de travail temporaire (EATT) met en œuvre pour les travailleurs handicapés qu'elle emploie un accompagnement, qui concerne également les périodes qui s'étendent entre ses contrats de mission.

Celui-ci consiste en un parcours individualisé qui tient compte des besoins et capacités de chaque travailleur handicapé, en lui permettant de développer, en vue de son insertion, ses capacités à agir par lui-même dans son environnement professionnel.

Il comporte notamment :

  • un diagnostic des besoins d'accompagnement du travailleur handicapé, tenant compte de ses capacités et de son projet professionnel ;
  • des actions de formation professionnelle pouvant inclure une formation en situation de travail, des actions d'évaluation des compétences et le cas échéant une validation des acquis de l'expérience ;
  • la proposition, en lien avec les entreprises utilisatrices, de missions de travail temporaire adaptées à l'objectif professionnel des personnes concernées ;
  • des expériences auprès d'autres employeurs en recourant notamment aux PMSMP (voir notre fiche technique) ou à la convention de rééducation professionnelle en entreprise.

Tout au long de ce parcours, l'EATT informe et sollicite en continu l'avis du travailleur handicapé, afin de développer ses capacités de choix.

Il est possible de créer des EATT (voir la liste des organismes habilités) et d’utiliser le prêt de main-d’œuvre temporaire à titre onéreux de salariés en situation de handicap comme support du triptyque emploi-formation-accompagnement à la réalisation du projet professionnel des salariés en situation de handicap.

L'emploi par les EATT de travailleurs handicapés ouvre droit à une aide financière, divisée en deux montants.

  • Le montant socle est forfaitaire et versée mensuellement au prorata du temps effectué. Il est encadré par arrêté et limité par l'avenant annuel au contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens. Le montant annuel de l'aide socle par poste de travail occupé à temps plein est fixé pour 2024 à 5 191 euros.
  • Le montant modulé varie de 0 % à 10 % du montant socle. Il est déterminé chaque année en tenant compte des caractéristiques des salariés, des réalisations en matière d'accompagnement renforcé et des résultats constatés à la sortie de l'EATT. Il est versé en une fois, après réception du bilan annuel d'activité de l'entreprise.
Textes Règlementaires

Articles L5213-13 et suivants du Code du travail, Décret 2019-39 du 23 janvier 2019, Arrêté du 1er janvier 2021, Décret n° 2024-99 du 10 février 2024